Christian Roth est Avocat aux Barreaux de Paris et Bruxelles. Il est fondateur et président d’honneur de l’Union des avocats euro-péens (UAE), président de la Commission franco-allemande du Barreau de Paris, vice-président de l’Institut Français des Experts juridiques Internationaux (IFEJI) et président du Cercle des Juristes Alsaciens et Lorrains. Il exerce au sein du cabinet rothpartners particulièrement en droit commercial et des sociétés.

Dans quelles circonstances avez-vous commencé à vous intéresser au droit allemand ?

J’ai effectué mes premières études non pas en droit allemand, mais en langue et littérature allemande. Klopstock, Lessing, les grands classiques Goethe et Schiller, et plus près de nous les frères Mann (Heinrich et Thomas), Musil, Hofmannsthal et enfin mes contemporains, Grass, Böll, Gläser, Handke, Wolf. Enzensberger n’était pas encore au programme !

Faisant ces études à l’Université de la Sarre, j’ai eu connaissance de l’existence du Centre Juridique Franco-Allemand, qui était à l’époque dirigé par le Professeur Charles Zorgbibe, plutôt internationaliste que germaniste. C’est ainsi que des cours en droit civil allemand étaient proposés dans le cadre de ce cursus, que j’ai ensuite poursuivi à Strasbourg.

Plus tard, alors que l’exercice du droit communautaire avait pris le dessus sur l’exercice des relations juridiques franco-allemandes, je suis revenu au droit allemand par le droit communautaire. C’est notamment à l’occasion d’un dossier de mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives se déroulant devant les juridictions françaises que nous avons soutenu, ma maître de stage et plus tard associée Lise Funck-Brentano, et moi le principe de proportionnalité issu du droit allemand, pour le voir transposé en droit français. Une grande première au début des années 80 !

Quelles différences ayant des incidences sur votre propre vie professionnelle relevez vous particulièrement entre les pratiques juridiques en France et en Allemagne ?

Je vois une très grande différence dans la formation, qui impacte beaucoup sur les recrutements que nous effectuons au stade des stages. Le juriste français doit très vite, et très tôt, « choisir » : entreprise, barreau, notariat, administration, magistrature. Pour chaque voie, il y a une école spécifique qui vient après le Master. Le juriste allemand reçoit une formation plus « universelle », qui lui permet d’apprécier son libre-choix. Cette différence dans la formation entraîne de fortes conséquences sur les recrutements dans le cadre des stages. Le Referendar sera souvent dans une position de préférence par rapport à un juriste diplômé d’un Master.

Selon vous, quels sont les métiers les plus adaptés à des juristes ayant des connaissances en droit français et en droit allemand ?

Tous les métiers du droit sont accessibles à des juristes ayant des connaissances dans les deux systèmes juridiques. C’est même un bonus que d’imaginer qu’une entreprise ou un cabinet d’avocats ou une juridiction puisse bénéficier de la compétence de quelqu’un ayant une ouverture sur les deux systèmes.

Quelles sont les recommandations que vous pourriez donner d’une façon générale à des jeunes juristes ?

Le premier conseil est, lorsqu’on souhaite exercer dans l’environnement transfrontalier, de maîtriser, autant que possible à perfection, a minima trois langues, dont l’anglais. Le second est de ne pas rechercher trop tôt la « spécialisation ». La formation dans un Cabinet d’avocats généraliste est très instructive, car elle permet de voir tous types de problèmes avec tous types de clientèle, et où la mission sera plutôt de régler la difficulté, plutôt que de « gagner » en droit. Le troisième est d’embrasser le métier de juriste comme un sacerdoce : ne jamais avoir l’impression d’en être lassé.

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